Peuples et Traditions

  " La mort est plus pres de nous que la paupiere de l'oeil. Que ton ami soit comme le soleil,
Et que ta femme ressemble aux etoiles dans la nuit. Rejouis-toi d'etre bon pour tout ce qui respre."

                                                                  poeme saharien

 La population du Sahara est difficile a chiffrer, car les limites territoriales sont mal definiest et les statistiques etablies par les Etats ou les organismes internationaux ne reposent pas sur les mems fondements. Les chiffres donnes sont donc des estimations.

 A l'ouest, les Maures (berberes arabises) comprennment 500,000 nomades et 100,000 sedentaires en Mauritanie. L'ex-Sahara espagnol integre 40,000 sedentaires et les celebres Regueibats n'excedent pas 20,000. Le Sahara marocaine regroupe 15,000 sedentaires berberes et 30,000nomades. Le Sud algerien rassemble 620,000 habitants. Les deux tires sont sedentaires.
Globalement, les nomades sont arabes dans le nord et berbers dans le sud. Mais ces dreniers, les
Touaregs, nomadisent aussi au nord du Mali, du Niger et du Tchad. Le Fezzan regroupe 30,000
sedentaires pour 10,000 semi-nomades. Les Berbers du Sud tnisien se sont sedentarises.
Les Toubous du Tibesti, du Borkou et de l'Ennedi, qui forment une race a p@art (ni berbere ni semitique), comptent une dizaine de milliers de sedentaires pour 35 000 nomades. Ils vivent au contact des Arabes dy Tchad (25,000). Les sedentaires sahariens du Soudan et de l'Egypte sont evalues respectivement a 15,000 et 30,000. La vie nomade est frugile, mais cette vie, qui demeure un exemple de reussite biologique et d'adaptation a un milieu difficile, est menacee par certains gouvernements don les directives administratives ignorent les specificitres culturelles des peuples nomades.

Les Touaregs

Ils sont apples "hommes bleus" en raison du voile de te te dont le bleu a l'indigo deteint sur leur visage. Ce voile mesure de 1,5 metres de long et de 0,25 a 0,5 metre de large. Son enroulement autour de la tete obeit a des regles precises mais variables selon les tribus. Cette piece de tissu provient du Nigeria. De race blanche, les Touaregs se repartissent en divers groupements dont les principaux sont les Kel Ahaggar (gens du Hoggar), les Kel Ajjer, les Kel Air, les Kes Adrar ou Iforas, les Jullemmeden, les Tengueridiff. Leur population est estimee a un million. L'elevage du dromaderes demeure leur principale activite. Il fournit des laitages qui consititutent la base de l'alimantation. Anciens guerriers, les Touaregs dedaignent l'agriculture pratiquee par les descendants de leus serfs. Ces eleveurs, qui nomadisent sous des tentes de peaux, vivaient autrefois du tribut preleve lors de razzias, mais aussi par des echanges. Ceux-ci leur permettent toujours d'obtenir le mil, le ble, le riz et les dattes, complement de leur alimentation. La langue, le tamacheq, constitue le denominateur commun. Les Touaregs eux-memes se designent comme Kel tamacheq - mot tpiareg (ou tarqui) est, lui, d'origine arabe. Les caracteres de cette lague s'appellent tifinaghs et sont des derives de l'ancien alphabet libyque. L'organisation politique des Touaregs est la meme pour tous. Chaque ensemble, appele aussi "confederation", est commande par un amenokal, chosi parmi les tribus nobles. Mais les touaregs ne se reduisent pas aux nobles et aux guerriers, leur societe integre des artisans, des religieux (marabouts) et des anciens esclaves a qui sont attribues des roles bien definis.
La femme possede un statut privilegie. En effet, l'organisation sociale repose sur des clans matrilineaires. L'heritage et la succession se font en ligne maternelle - le mariage est le plus souvent monogame. Le role de la femme touareg (non voilee) est culturellement impotant. Dechargees des travaux domestiques par la presence de serviturs, les femmes (nobles particulierement) s'adonnent a l'artisanat, a la poesie ou a la musique. Nobles et religieux l'invoquent avec eloquence. L+'oeuvre de Chales de Foucauld, qui rassembla nombre de poesies touaregs, montre l'importance de leur inspration dans la culture saharienne.

"La beaute d'une femme eclipse le soleil...
Comme eclat, elle est la lune ou sa compagne,
L'etoile que vous voyex au ciel.
Comme oeil, c'est la gazzelle. Que dire de son parfum ? "
Foucauld, 1925 TY.I.,368-372


Les Toubous

Des similitudes dans le mode de vie et l'habillement (hommes voiles) ont abusivement assimile les Toubous ou Tedas a des Touaregs noirs. Pourtant, des differences significatives les opposent. D'une part l'organosatioan sociale des Toubous est de type patrilineaire, d'autre part leur langue appartient au groupe malo-tchadien, alors que les Touaregs sont berberophones. Leur population est estimee a 100,000, repartie dans la partie centrale dusud du Sahara, plus particulierement au Tibesti, Ennedi et Fezzan. Enfin leur peau est noir. Comme les Touaregs, l'elevage nomade consitue la principale activite des Toubous. Au nord, ces derniers elevent des chameaux et des chevres, au sud des bovins. Autrefois les razzias occupaient une place importante de l'activite economique. Aujourd'hui l'heritage feodal marque de son empreinte une soxiete fortement hierarchisee. Certains clans constituent une veritable aristocratie dont fait partie le chef de tribu (le derde) et dominent les libres vassux, les serfs, les esclaves et les artisans groupes en castes.

Les Maures

A l'extreme ouest, les Maures possedent une societe a la fois hierarchisee et decentralisee. L'unite de base demeure latribu liee a un ensemble domine par une double aristocratie tribale. L'une est guerriere, l'autre maraboutique. Cette dernier a donne a l'Islam au cours des siecles (particulierement au XVIII) un rayonnement spirituel prestigieux. La langue, le hassanya, est un dialecte arabo-berbere qui a quasiment elimine la langue berber utilisee avant la penetration arabe. Les femmes maures etaient autrefois l(objet de pratiques contre lesquelles les autorites actuelles continuent de lutter: le gavage des filles nobles. Ces fillettes non puberes (huit ou neuf ans) etaient confiees a des servantes ou matrones specialisees. Ces derniers avaient pour mission de les gaver au lait de chamelle pendant plusieurs mois afin de les rendre obeses, voir difformes, pour les presenter a d'eventuels epoux. Ce fantasme de la grasseur reactualise une image femine de fecondite et de fertilite tres ancree dans certaines regions d'Afrique.


"Que la tente soit ouverte au voyageur comme la mosquee l'est au croyant."
Dicton touareg


Tous ces peuples ears dans ce vide immense de 8 millions de kilometres carres possedent un trait commun qu'ils partagent dans un acte social confinant au rituel: L'atey. Au Sahara. toute rencontre, toute palabre, toute treve passes par la ceremonie du the. Pour cela, il faut de l'eau et du feu, du the vert et du sucre, deux theieres et de petits verres. L'officiant commence par rendre grace a Dieu: "Bismillah..." Ensuite il lave le the. Debute alors un ballet pour deux mains et deux theieres ou l'agilite le dispute a la precisionj et a l'enchainement des gestes.
Dans un premier temps on laisse bouillir l'eau et le the dans la premiere theiere jusqu'au ce qu'elle chante. Le breuvage est alors verse dans la seconde. Puis on ajou
te le sucre et on le melange en transvasant plusieurs fois le contenu de la theiere dans un verre. Tout cela s'opere dans une geometrie de gestes amples et parfaitement mesurees. Quand le the commence a mousser au bas de l'arc dore qui tombe de plus en plus haut du bec verseur, il ne reste plus qu'a gouter.
Ce rituel se reproduit trois fois. Le premier the est fort, le deuxiere un peu moins, le troisieme
est
byvable par tous. Sous la grande tente, chaque savoure le lien de la rencontre et du partage dans une hospitalite qui reste le trait distinctif des gens du desert. D'un cote de la tente ou de la zeriba, une cantine de metal, un fusil, un poignard, un gros reveil;de l'autre de grands sacs de cuir souple debordant d'etoffes, de boites a couture, a bijjoux; des parfums. Un coffret de bois peint et cloute de cuivre sert a ranger tous les ustensiles du "atey". La ceremonie peut durer des heures. Un vieillard psalmodie a mi-voix en manipulant son chapelet. Une femme se fait coiffer par une autre, huiler aussi, embaumer meme. A l'exterieur, aux abords de la tente, des enfants jouent a faire courir des simulacres de petits chameaux confectionnes avec des vieux chiffons ou des restes de cuir.
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